Poupette est née le 31 décembre 2014. Depuis longtemps je rêvais de ce moment. Avant d’être enceinte je me demandais comment ça se passait cette rencontre, quand une mère voit l’enfant qu’elle a porté tous ces mois pour la première fois. Quand j’étais enceinte je me suis beaucoup questionnée : allais-je la reconnaître ? Comment je saurai que c’est ma fille ? Allais-je l’aimer ? Allait-elle m’aimer ? Et le plus souvent, quand on se renseigne, on tombe sur ces affirmations : tu verras, ce sera comme un tsunami émotionnel, quelque chose que tu n’auras jamais vécu, le plus beau jour de ta vie, ce sera comme une évidence. Alors je l’attendais, mon tsunami.
Quand Poupette est née, il était cinq heures du matin. J’avais eu mes premières contractions vers 13h la veille, j’étais fatiguée. La longue nuit d’attente avait été éprouvante, et Poupette sort de moi, de ce corps dans lequel elle avait vécu neuf longs mois. Cordon autour du cou, on me dit « faites un bisou*, on l’emmène ». Elles me l’emmènent, de longues minutes à attendre, plus de peur que de mal, apparemment tout ça est habituel, mon amoureux me la ramène, on me la pose dessus, et je ne vois qu’un être violet, poilu, et je suis fatiguée. Ça vous fera peut-être rire mais mes premiers mots ont été « elle n’est pas très jolie** »… La journée passe, la première nuit en tête à tête aussi et… j’attends mon tsunami. Oui ce petit être est joli, oui je suis heureuse qu’elle soit là, fatiguée, mais heureuse. Tout le monde est ému, je le suis aussi, un peu. Mais un tsunami ? Non, rien de tout ça.
On rentre à la maison, on prend nos marques. On s’habitue à ce bébé, on le regarde pendant des heures, on prend 3452 photos. On vient nous voir, on s’extasie sur elle. Elle mange bien, elle dort bien. Tout va bien. Mais tout ça, c’est comme si je me voyais le vivre. Je suis comme un automate, je me regarde faire, et tout le temps je me demande : « mais ça m’arrive vraiment à moi ? ».
Les jours, les semaines passent, et le tsunami ne vient pas. Alors, je commence à me poser des questions : et si je ne l’aimais pas ? Et si je n’étais pas faite pour ça ? Bien-sûr j’aime la voir, j’aime ces siestes où on dort, elle sur moi. J’aime sortir avec elle et je suis fière. Mais pas de tsunami. Pas cet élan d’amour que j’imaginais ressentir.
Le 12 avril 2015, Poupette a un peu plus de trois mois. On rentre d’un weekend chez mes parents, l’homme gare la voiture, je monte en vitesse, prépare le bain. Puis je sèche, je frictionne, je cajole, et je chante, comme souvent, mal, comme toujours, une chanson inventée, comme d’habitude : « et on va mettre le pyjama blanc*** ». Et là, le plus beau son jamais entendu sort de sa bouche, de son corps : son premier rire. Elle me regarde, les yeux plein d’amour, et elle rit. Et là je peux vous dire que ce n’est pas un tsunami que j’ai ressenti, c’est 18 tsunamis que j’ai pris en pleine face.
Ce jour-là, je crois que je suis devenue maman. Encore aujourd’hui, je me réveille parfois en me demandant si ça m’arrive vraiment à moi, je ne réalise pas toujours. Mais je crois qu’il faut le dire, à toutes ces personnes qui un jour donneront la vie : l’amour qu’on a pour un bébé, finalement c’est comme une histoire d’amour : certaines commencent par un coup de foudre, et d’autres se construisent dans le temps.
Et je ne pensais pas que ça aurait été possible, mais je l’aime chaque jour davantage, cette petite Poupette.
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* Bon, on en parle de ça ? Personnellement, elle sortait de moi, j’ai trouvé ça un peu dégueulasse, je n’avais honnêtement pas très envie de l’embrasser à ce moment-là, bref, on en parle ?
** Je vous rassure, une heure après, elle avait rosi, et est devenue et sera pour toujours le plus beau bébé du monde, cela va sans dire !
*** Sur l’air du paradis blanc, c’est très joli. Oui, je vous assure !
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